L’histoire de Domotic, c’est celle d’un jeune garçon moderne, mais à la façon de son époque. On vous parle d’un temps, le notre, qui, volontairement ou involontairement, ne fait pas la différence entre une guitare Harmony et un synthé analogique, Les Beatles et Autechre, Protools et un écho à bande de 1966. Fétichiste contraint de questionner sa tendance (la notre) au passéisme, Stéphane Laporte a ainsi passé la majeure partie sa carrière à se chercher entre deux pôles, le passé sépia des images et des catalogues qu’il collectionne et le futur trouble qu’un jeune musicien se doit encore de rêver incarner. De l’electronica pure et ambiguë de son premier Bye Bye (Active Suspension 2002), dont toutes les sources sonores proviennent d’un synthé jouet, jusqu’aux pop songs électroniques gorgées de poussière de Before and After Silence (2012), en passant par les chansons pop racées de Ask For Tiger (2005), tous les disques de Domotic, tous ses projets parallèles aussi (Centenaire, Egyptology, Karaocake) scintillent de cet étrange halo, impossible à dater, si emblématique de notre temps présent et qu’on retrouve autant dans notre folk, notre techno que dans les étranges images qui peuplent nos smartphones. Mais ne reléguons pas seulement Domotic à l’emblème: les fantômes qui errent dans ses drones, son ambient et ses chansons sont à lui et à personne d’autres, sa manière de les capturer et de les mettre en son aussi. Formé comme ingé son hyper habile et scrupuleux mais scrupuleusement attaché au danger (outre les disques des groupes sus-cités dans lesquels il est impliqué comme musicien, il a notamment réalisé et/ou enregistré et/ou mixé le dernier Konki Duet et le Super Forma d’Orval Carlos Sibelius), Domotic construit son monde aural comme personne d’autre, avec les matières et les suites d’accord de personne d’autre. Et pour ceux qui trépigneraient d’entendre plus fort cette singularité s’exprimer, qu’ils se rassurent : le meilleur – le plus étrange – reste à venir.